KEITH HOPEWELL

Pour Hopewell, l’essence de l’acte de peindre se situe dans le corps et l’extension de la main, afin de communiquer sa connexion mentale interne pour la fabrication externalisée d’un paysage. Une sorte de torsion vers l’exterieur, de ce qui était , à l’origine, invisible. Si la peinture peut marquer les temps alors chaque marques ici semblent abandonnées, hors du temps. Dans le moment liminal résultant de l’application répétitive de lignes, il est capable de produire un niveau explicite de précision de vecteurs droites, normalement irréalisables par une main en mouvement. En fait, l’usage du médium aérosol dans ses travaux, questionne l’idée de la marque de la main, eu égard à la nature anamorphique de la bombe, et de la pressurisation de la peinture par un système de valve. Il y a une sorte de réfraction dans ce procédé ritualisé, comme une réalité innommable, passant obliquement dans l’interface entre un médium et un autre. La présence directe d’un esprit en action, construit, résonnant du corps afin de composer sur la surface plane, fait écho à la notion de Georges Berkeley : « Rien ne peut exister sans un esprit pour le saisir, le monde extérieur doit pouvoir exister sans l’esprit de dieu »
Dans l’harmonie et le contraste de l’entremêlement spatiale des couleurs, cette exposition tend à atteindre un point pur, une sensation ou une expérience méditative, ou l’on peut réinterpréter l’idée de la peinture, comme un post-medium avec la possiblilité d’exister en dehors d’elle-même dans différents temps.

« Locke et Descartes étaient convaincus que la connaissance qui nous parvient par les sens est trompeuse. Au-delà de ce que nous percevons comme des couleurs, des sons et des odeurs, rien n’existe sinon l’extension et le mouvement. Ou que, pour le moins, la substance de ce qui constitue la réalité est la croyance au mensonge qu’elle contient… »

Claude Levi-Strauss